vendredi 28 décembre 2012

octobre 2012 [Abbé de Tanouarn - Monde et Vie] Mais que se passe-t-il au Synode ? – Rien…

Texte paru dans Monde & Vie - 20 octobre 2012
Une année de la foi? Quel enjeu, alors que depuis cinquante ans la foi a été si malmenée ! Une nouvelle évangélisation ? Quel bonheur, alors que l’Eglise a paru enfouir son talent pour ne pas avoir à le montrer au monde…
 
Jean-Marie Guesnois dans le Figaro, nous gratifie de formules ronflantes qui font plaisir. Exemple le 11 octobre, jour anniversaire de l’ouverture du Concile : « Vatican II a-t-il vieilli plus vite que l’Eglise? ». Je reconnais que cela fait du bien découvrir cette question dans le Figaro. Mais il n’est pas sûr que cela renvoie à l’atmosphère dans laquelle se déroule en ce moment (et depuis le 9 octobre) le synode sur la nouvelle évangélisation… dont Guesnois est censé nous entretenir.
 
Comment savoir ce qui se passe, à huis-clos, parmi les 262 cardinaux, patriarches, archevêques, évêques, supérieurs généraux de congrégation qui sont en assemblée à Rome en ce moment? C’est difficile. L’agence APIC laisse fuiter de temps en temps un mot, une expression plus tranchante que les autres… L’impression que j’ai en parcourant les textes, c’est que ce synode ne fait que répéter Evangelii nuntiandi de Paul VI (1 971) et Redemptoris missio de Jean Paul II (1991). En 2012, on n’a pas beaucoup avancé. De temps en temps, il y a – en dehors du Synode épiscopal mais lui étant adressé – un mot de Benoît XVI : huit discours rien que la première semaine du Synode. Un telle abondance ne lui est pas habituelle, à notre pape. Il parle du « vide » dans lequel se débattent les sociétés occidentales.
 
Il redit l’importance de la foi en Dieu. Il répète que « nos oreilles sont sourdes à la voix de Dieu », comme il l’a souvent dit déjà. Il a même rappelé qu’ « il ne fallait pas écarter la pensée de no tre salut », ce qui rend un son un peu pessimiste, nettement plus traditionnel. Mais enfin, le leitmotiv, comme dans Evangelii nuntiandi, comme dans Redemptoris missio, c’est « la joie de la foi ». Ce message est-il proportionné à la terrible crise de civilisation que nous traversons? Sommes-nous capables d’éprouver – ici et maintenant – la joie de la foi?
 
Pour cela, nous enseigne le vieux catéchisme, il faut que nous ayons rompu avec le péché. Il ne s’agit pas de goûter à une sorte de bonheur artificiel, fait de surmotivation, de surexposition, de surmultiplication… Non ! Gare aux erreurs de calcul. Il faut humblement accepter d’être sauvés par le Christ, sous peine de ne rien connaître de sa miséricorde.
« Les hommes d’Eglise modernes semblent presque avoir honte de la foi… »
Le pape nous dit que le grand problème de l’Eglise, c’est « la tiédeur » des chrétiens. Au synode, on parle, comme dans les vieux documents déjà cités, de sainteté, de témoignage, de foi effervescente… Comme si tout cela allait de soi. Comme si la ferveur n’était pas un don de Dieu. Comme si elle était programmable par l’homme. Et surtout comme si l’esprit charismatique était le seul avenir de l’Eglise.
 
Face à cet état d’esprit encore trop proche de l’optimisme conciliaire, il me semble que deux personnalités se sont exprimées avec force, le Père Michel Viot et le Père Niklaus Pfluger, l’un prêtre dans le diocèse de Blois, l’autre premier assistant du Supérieur général de la FSSPX.
 
C’est à travers un livre intitulé La Révolution chrétienne, publié aux éditions de L’Homme nouveau, que le Père Viot, s’appuyant sans complexe sur une théologie luthérienne très pessimiste sur l’homme et sur les humanismes, chrétiens ou pas, rappelle à tous et à chacun que le Christ est avant tout sauveur, qu’il nous délivre des idoles de notre temps et qu’il nous ramène au vrai Dieu.
 
Quant au Père Niklaus Pfluger, il vient de donner un entretien très bien ficelé traduit et publié le 13 octobre par l’Agence Dici. Son diagnostic ? « Les hommes d’Eglise modernes semblent presque avoir honte de la foi, c’est pourquoi ils se préoccupent de la défense de l’environnement, de la redistribution des biens et de l’aide au développement. Nous ne pouvons pas attendre qu’ils se ressaisissent. Nous devons aller davantage à l’extérieur, gagner une influence publique et rebâtir la Chrétienté. Avec mesure, humilité et charité ».
 
N’en déplaise à Mgr Pascal Wintzer, évêque de Poitiers, « la chrétienté » n’est pas seulement « la sacralisation d’une forme historique de la présence de l’Eglise catholique », comme il le déclarait le 10 octobre à Rome. La chrétienté n’a pas seulement un passé. Elle a un présent et un avenir. C’est l’aujourd’hui de la chrétienté qui nous intéresse, ce grand « Nous » que nous formons, nous les chrétiens, dans un élan à la fois personnel et collectif vers le salut (et non vers le monde)… Le pape a su manifester cet élan un peu partout dans le monde, le rendre visible. Les évêques… Dans l’atmosphère feutrée du Synode, on sent bien qu’ils n’ont pas encore compris à quel point leur mission est de rejoindre l’humanité là où elle est, dans la fange de son péché, dans sa négation de Dieu, dans son refus de tout ordre que l’homme n’a pas établi lui-même… Il va bien falloir se salir les mains, c’est tout ce que le Concile avait oublié de prévoir.
Abbé G. de Tanoüarn

Une leçon d’italien
Reprendre le mot « aggiorna mento » (mise à jour dans l’italien du pape Jean XXIII) à l’adversaire progressiste et aux tenants de l’herméneutique de rupture pour le ramener à la continuité de l’Eglise. Voilà à quoi s’est exercé Benoît XVI le 11 octobre 2012, pour les 50 ans du Concile : « Aggiornamento ne veut pas dire réduire la foi, la plier à l’air du temps, au bon plaisir de l’opinion. Tout au contraire. Comme le firent les pères conciliaires, il nous faut porter notre aujourd’hui dans le temps de Dieu.»
G. T.

2 commentaires:

  1. Comment allons-nous faire pour émerger des catacombes du silence dans lesquelles les Chrétiens sont et se sont enfermés ? La question est là ! Comment faire, maintenant que de mauvais plis sont pris pour reprendre la parole, nous montrer, oser le faire et que cela porte ses fruits ?
    Clément d'Aubier

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  2. Curieux cette intervention de l'Evêque de Poitiers.

    En quoi la "chrétienté' signifierait la sacralisation d'une forme historique de présence chrétienne ?

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